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Introduction

Dans quelles mesures la multisensorialité modifie-t-elle l’expérience de la lecture?

Nous aurions tendance à dire que la lecture est une interprétation visuelle de signes graphiques nous permettant la compréhension d’un message. Cette définition met en jeu uniquement la vision, mais ce n’est qu’une apparence.

Tout abord, qu’est-ce que lire? Est-ce une simple interprétation visuelle, ou bien plus? Issu du latin, lire ou « legere » (rassembler, recueillir ), était à l’origine une lecture orale, car l’information souhaitée était acquise par l’audition. En effet, peu d’individus avaient accès à ce savoir, il fallait donc une tierce personne pour décrypter le message et le transmettre à l’assemblée auditrice. Si le corps est engagé par la lecture, il est important de comprendre de quelles manières. Le contexte, le format et l’environnement sont des facteurs à prendre en compte, car lire un ouvrage identique dans une bibliothèque ou dans notre demeure modifie sensiblement notre comportement. C’est la forme qui implique nos organes de perception dans ce procédé. Comprendre le livre et son évolution devient alors essentiel pour appréhender sa relation au corps. Des moyens de lecture moins classiques permettent à une minorité de personnes d’accéder à l’information « écrite » par l’intermédiaire du toucher, comme le Braille. La lecture n’est pas monosensorielle, les sens peuvent s’entremêler et s’associer entre eux. Les sens ont la particularité de s’entendre entre eux, notamment le visuel et l’auditif. Ainsi l’image peut appeler un son..

Ces pratiques s’ancrent dans le graphisme, et celui-ci peut se jouer de nos sens par le signe et le principe de connotation. Par quels moyens la composition visuelle peut-elle faire appel à nos sens? Pourquoi se restreindre aux connotations papiers sur un support numérique? N’y a-t-il pas des avantages à augmenter la lecture? Aujourd’hui, les nouvelles technologies s’hybrident et tendent à cohabiter avec des supports plus classiques, mais ces interactions liées au papier connecté, que nous permettent-elles? Ces nouvelles formes arrivant dans nos quotidiens semblent repenser ainsi de nouveaux usages, notamment en prenant en compte les handicaps visuels. Ces personnes sont le parfait exemple d’une lecture différente à la nôtre. La définition a également évolué avec l’apparition des supports numériques, « lire signifie alors transformer un message codé dans une forme déchiffrable par l’utilisateur », cela s’emploie également en musique avec la lecture d’une partition. Il est peut-être temps de repenser à une nouvelle définition de la lecture.

Partie I

Comprendre le Livre

A/ Évolution du livre

Qu’est-ce que la lecture? Cette action nous sert à prendre connaissance d’un contenu par la reconnaissance et l’interprétation de signes graphiques et se pratique dans la plupart du temps par le biais de notre sens oculaire. Les Hommes ont depuis tous temps transmis leurs messages par le dessin (hiéroglyphes), puis par l’écriture. Ces traces linguistiques permettent de transmettre et de conserver nos notions les plus abstraites. Si les supports ont quelque peu évolués, la manière de lire, elle reste quasi inchangée. La naissance du livre, tel que l’on le connait, résulte de nombreuses découvertes et innovations techniques après l’apparition de l’écriture. Chronologiquement, c’est l’invention du tracé sur une surface (parois grottes préhistoriques) qui apparait en premier lieu, puis le système des signes qui s’organise pour que l’écriture apparaisse, permettant ainsi aux différents textes écrits (éléments portatifs) d’être rassemblés dans un seul et même ouvrage: le livre. Ces modifications sont accompagnées d’une diversité de changements dans les supports (matières et formes).
Les premiers supports d’écriture restent toujours en lien avec leur lieu et leur époque, ainsi l’argile, la pierre, le papyrus, le bois, le cuir, le métal et le tissu apparaissent comme matériaux. La pierre ou les tablettes d’argiles, étaient trop volumineux, encombrants et/ou peu faciles à transporter, poussant la recherche de support plus maniable. L’apparition du volumen,( rouleau sur lequel le texte est écrit perpendiculairement à l’axe d’enroulement, en une succession de blocs de lignes d’égale longueur séparés les uns des autres par des espaces blancs) permet une plus grande aisance de manipulation, car il est plus léger et flexible, mais reste toutefois fragile à transporter. Pouvant dépasser 40mètres de long, ces grands rouleaux peuvent stocker un grand nombre d’informations sur un même support, seulement, enroulé il ne permet qu’un usage séquentiel des données.
Le lecteur ne peut accéder directement à un repère précis, son sens de lecture lui est imposé. C’est par la création et l’utilisation du parchemin qu’apparait le codex, en peau d’animale traitée c’est le support d’écriture essentiel du livre du début de notre ère jusqu’au IXe siècle. Il sonne comme une révolution dans le monde de l’édition, car il permet une classification et hiérarchisation des contenus, une rapide recherche et un ajout d’informations par des annotations.. Le mot parchemin, en grec pergamênê, vient du nom de la ville de Pergame, mais le roi d’Égypte Ptolémée V craint une rivalité certaine et interdit l’exportation du papyrus vers celle-ci. Le roi Eumène II (197-158) venant d’y fonder une bibliothèque, développe alors l’usage de la peau de chèvre ou de mouton. L’utilisation du parchemin entraîne des changements fondamentaux dans l’histoire du livre. Ce support est solide, facile à plier, inscriptible des deux côtés, prend également moins de place dans les bibliothèques, il apparait comme une véritable révolution technique et intellectuelle. L’organisation plus rationnelle du texte, lui donne un espace délimité et une entité visuelle autonome. L’histoire du livre est donc une suite d’innovations technologiques, commerciales et esthétiques qui ont permis d’améliorer la transmission des idées, l’accès à l’information, la conservation des textes, la portabilité et le coût de production.

Toutefois, si au cours des siècles on a vu naitre beaucoup d’innovations autour du livre, depuis l’imprimerie de Gutenberg peu de choses ont changé. C’est ce que nous développe El Lissitzky dans Notre Livre (U.R.S.S), 1926, même si des procédés mécaniques sont venus remplacer des procédures manuelles, cela ne constitue en rien une modification fondamentale du procédé, puisque celui-ci est simplement automatisé. Si de cela ne constitue en rien une modification fondamentale du procédé, puisque celui-ci est simplement automatisé. Si de nos jours, nous restons dans une société hyper matérialiste, le concept est à la dématérialisation. Nos lettres et divers papiers se voient supplantés par l’utilisation du téléphone et des mails; le stockage d’informations est de plus en plus numérique par la numérisation de nos supports papiers. «  Le matériel se réduit, nous dématérialisons, nous remplaçons des masses encombrantes de matériel en libérant des énergies. » Pour El Lissitzky, le livre n’évoluera que par l’intégration de formes auto-sonores ou cinémato-sonores, ainsi que par une adaptation plus plastique et figurative des contenus. Les signes alphabétiques sont pour lui comme un handicap à la lecture. Dans l’alphabet, chaque signe est représenté par un son, la lecture mentale n’est pas silencieuse. Le hiéroglyphe permet au lecteur de lire sans avoir besoin de connaître la langue. Si le mot possède une dimension temporelle en tant que son, une dimension spatiale en tant que figure, le livre lui doit pourvoir rassembler les deux à la fois. Il est nécessaire de nous détacher de nos habitues confortables de lecture. C’est ce qu’il tente de faire en mettant en page différents poèmes de Maïakovski dans Dlia golosa, 1923, le livre pour la voix (voir Livret ATC).

B / Un engagement pour le corps

La vue prédomine largement nos cinq sens dans notre appréhension du monde comme dans la lecture, pourtant des processus cognitifs ancrent nos diverses activités corporelles. Lors d’un travail de lecture, notre corps est largement mobilisé: l’oeil pour recueillir les informations, nos mains qui opèrent directement avec le support et le cerveau qui synthétise les données pour la bonne compréhension. Les sens marchent en combinaisons, le corps entier est alors engagé dans le système de lecture. Un livre ancien par exemple va nous sensibiliser par différents moyens: les pages et l’encre usées par le temps vont dégager une odeur particulière, de même lors du changement de page certaines papiers vont émettre un bruissement différent et une diversité des matières papiers dans la dimension tactile par le toucher. On a ici l’ouïe, la vue, le toucher et l’odorat. Pour chaque livre ancien ou récent le ressenti sera distinct.
Notre corps s’inscrit également dans l’espace, c’est alors que le support, la forme et le contexte ont leurs importances dans notre démarche de lecture. Fritz Nies dresse une large iconographie par son interrogation sur les usages sociaux de la lecture, en analysant une multitude d’images représentatives de scène de lecture dans la peinture, la photographie, l’affiche, la carte postale, l’illustration, et autres.. Ce parcours nous invite à creuser les questions du rôle du corps, de sa position, de son environnement dans l’action de lecture.

Les mutations sociologiques, politiques, économiques à travers le temps ont donné lieu à une évolution des supports de lecture et inéluctablement des pratiques qui s’en suivent. Lire une pierre gravée n’implique pas une position corporelle identique à la lecture d’un journal. La pierre est lourde et suivant sa taille et son emplacement, notre corps va s’adapter et adopter pour optimiser une position confortable. De même, feuilleter un livre de poche dans un lieu public est très différent que consulter un roman dans notre canapé, notre posture sera différente car le contexte et la prestance sociale que nous nous imposons modifient nos habitudes. Les matériaux peuvent également nous influer, la fragilité de certains, comme du papyrus ou textes anciens, peut porter préjudice au contenu suivant le lieu de lecture.
Avec l’apparition des supports numériques, on voit apparaître de nouveaux comportements. Réduits à leur plus simple efficacité, ces objets sont de plus en plus fins et petits (toujours dans la limite de la lisibilité), ils peuvent être transportés partout et tout le temps. Et en imposant moins de contraintes au corps, notre lecture est plus libre. Nous verrons plus tard si les appareils électroniques sont capables de compenser la « physicalité » des livres par la réintroduction de « corporalité » dans notre lecture.
Dans le domaine éditorial, il existe donc plusieurs possibilités d’interaction avec le corps. La campagne de l’agence d’intérim Adia sollicite notre position dans l’espace pour obtenir une double lecture. Ce jeu d’action entre proximité et recul ne nous laisse pas percevoir le même message. La phrase d’accroche par sa grande taille nous induit une information qui se révèle erronée dès la lecture du texte plus petit. Ici, l’affiche donne à l’individu une expérience de lecture par le mouvement de rapprochement de notre oeil et de notre corps pour y décrypter le message.

Toutefois si nous recueillons 60 à 90% des informations par la vue, des dispositifs de lisibilité par le toucher sont conçu pour les personnes souffrant de malvoyance ou étant aveugle. Le braille est conçu pour les personnes ne pouvant lire de texte « en noir » et démontre que la lecture n’est pas uniquement visuelle. Le lecteur se sert de ses deux mains comme pour se repérer. Il commence par suivre la ligne à deux mains jusqu’au deux tiers, puis pendant que la main droite continue jusqu’à la fin de la page, la gauche part à la recherche de la ligne suivante. Le décryptage est lent car la lecture se fait lettre par lettre. Un ouvrage traduit en braille est en moyenne trois fois plus volumineux que l’original.

Comment fonctionne le braille?
En braille standard, un caractère est représenté dans une matrice de six points sur deux colonnes, chaque caractère étant formé par un à six points en relief. Ces points sont conventionnellement numérotés de haut en bas et de gauche à droite, selon le schéma suivant : Par exemple, la lettre c se représente par les deux points supérieurs, soit la combinaison 1,4. Ce système permet de représenter jusqu’à 63 caractères (26-1), une matrice sans aucun point représentant une espace. La signification de chaque symbole dépend de la langue utilisée, ce qui explique pourquoi le braille japonais, coréen, cyrillique ou autre diffère du braille français. Les langues utilisant l’alphabet latin emploient le plus souvent le même codage pour les lettres de base, mais les lettres accentuées, d’autres symboles et, parfois, les signes de ponctuation diffèrent.

Une dimension tactile apparait également dans l’édition pour l’apprentissage. Afin d’éveiller de nos sens et de les développer notre esprit, les ouvrages jeunesses incorporent des matières. La série des livres illisibles (libri illeggibili) par l’artiste et designer Bruno Munari, donne la possibilité au lecteur de devenir acteur en lui laissant la libre interprétation du livre.
Lors d’une lecture, le corps est engagé dans sa globalité, il s’adapte ainsi à ce qu’il lit mais peut aussi bien devenir lecteur. Les sens ont des fonctions psychophysiologique qui permettent de recevoir et de comprendre des informations reçues. Physiquement, la lecture implique des réactions comportementales vis à vis du contexte, du contenu et du support. Mais les sens engagés ensemble apportent-ils une valeur ou est-ce du superflu ajouté à la lecture? Si l’on n’y prête un peu d’attention, la multisensorialité est bien plus présente que ce que l’on pourrait penser.

Partie II

Les Sens et le Sens

A / Multisensorialité

La multisensorialité est la combinaison de plusieurs sens, cela peut s’articuler par le phénomène de synesthésie, mais aussi par nos réflexes d’apprentissage par association d’idées. Elle est indispensable dans la compréhension.

Qu’est-ce que la synesthésie?
Le terme d’origine grecque “aisthesis” désigne la sensibilité, l’aptitude à avoir des sensations. Le préfixe “syn” signifie “ensemble”. La synesthésie est l’association spontanée et involontaire de modalités sensorielles différentes, comme par exemple “voir la musique”, “goûter la rugosité d’une surface” ou “voir les chiffres en couleurs”. Ces associations concernent aussi les modalités affectives et cognitives.

« Les parfums les couleurs et les sons se répondent », Baudelaire, Correspondances, Les fleurs du mal.

Une partie des chercheurs pensent que l’enfant nait automatiquement synesthète, puis lors du développement de l’individu par l’apparition de la conscience de soi et des divers apprentissages, nos perceptions multimodales s’estomperaient dans notre inconscient. Seuls quatre pourcents de la population garderait ces facultés jusqu’à l’âge adulte. Il est toutefois possible que des synesthésies apparaissent de manière spontanée à l’âge adulte, après un choc affectif fort, au cours d’une séance d’hypnose, à la suite d’un traumatisme cérébral, de consommation de drogue ou encore en faisant l’amour. La synesthésie varie selon chaque personne et ne s’applique jamais de la même manière. Elle peut être bimodale par l’association de deux modalités entre elles mais à sens unique. Si un son évoque une couleur, l’apparition de celle-ci n’enclenchera pas une sensation auditive. Le croisement multimodal ( au moins trois modalités) pouvant être bidirectionnel, le son peut révéler une forme et une couleur. La synesthésie catégorielle (cognitif) se réalise par l’association d’un mode sensoriel et dune représentation mentale : nombres, lettres, graphèmes, unités de temps, phonèmes, noms…

Les synesthésie les plus courantes sont:
– L’Association graphèmes à des couleurs : les lettres et/ou les chiffres sont représentés par des couleurs et des formes
– L’Association sons à des formes / couleurs : les stimuli auditifs se manifestent visuellement en formes / couleurs / mouvements. Les sons forment des spectacles graphiques qui peuvent être en trois dimensions et aussi dynamiques, précis et riches que ces sons.
– La Synesthésie numérique : les suites de nombres, les unités temporelles dessinent une “carte mentale”, structurée dans l’espace en trois dimensions. Les calendriers sont parfois vus également comme des architectures colorées.
– Association lexicale → gustative : synesthésie rare et peu documentée, chez certaines personnes les mots individuels ainsi que les phonèmes du langage parlé procurent des sensations de goûts dans la bouche.
– L’Association pensée à des formes / couleurs : ce type de synesthésie cognitive, elle aussi peu documentée, rend visibles les pensées, les idées, les concepts. C’est ce type de synesthésie qui servira de base de travail au Projet Synesthéorie.
– Association proprioception → formes / couleurs / mouvements: fortement chargée d’affects, cette synesthésie somesthésique agrémente les sensations corporelles internes (particulièrement la douleur) d’autant d’images qui suivent le déplacement et l’intensité de ces sensations dans le corps.
– Associations affects / formes / couleurs : certains peuvent “voir” leurs affects, la manifestation la plus connue peut se traduire par des auras qui se dessinent autour des personnes fréquentées.
– Personnification ordinale/linguistique : des séquences, comme les nombres, les jours de la semaine, les mois et lettres sont associés avec des personnalités.

Cette expérience individuelle donne une perception et un traitement des données uniques en associant synesthésie et mémoire. Les sons, les formes visuelles, les unités temporelles ou les graphèmes viennent constituer les stimuli de base, qui seront associés à des sons, des températures, des couleurs ou encore des goûts. La mémorisation d’une personne synesthésique se fait ainsi naturellement par association, de façon automatique et involontaire. L’enregistrement de nouvelles informations et alors plus facile par la réunion de plusieurs sens et ainsi interfèrent sur notre compréhension. Ce phénomène neurologique amplifie le signe, dans ce cas, il peut y avoir plusieurs signifiants pour un signifié. Par exemple, la lettre A (le signifié) gardera sa signification même si la forme « A » est associée à la couleur jaune.
Le signe reste toutefois très arbitraire, car dans le cas de la synesthésie chaque phénomène neurologique est propre à l’individu. Dans le cas de non synesthésie les signes vont varier selon la langue, la culture, les traditions, etc.. Si le signifiant est indissociable du signifié, il n’existe pas de rapport entre la forme prise par le signifiant et la définition du signifié. Dans l’art comme dans le cas de la lecture, on ne peut séparer le fond de la forme, notre corps donne accès à certains sens par plusieurs sens.

Par ailleurs, notre cerveau peut venir interpréter des messages et vient surpasser la vision. C’est le cas de la lecture globale, notre esprit entreprend une correction automatique s’il y a erreur sur un mot. Nous sommes capables de lire un mot, même avec un manque de lettres ou simplement désorganisation du mot. Pour « corrger », notre cerveau lit « corriger». Cette reconstitution du non-vu s’explique par une perception active de notre imagination par un acte de notre esprit. Lire une langue étrangère est toutefois beaucoup plus complexe, l’effort sera plus intense sans la compréhension.

«Je suppose que nous ne voyons que ce que nous connaissons ; notre œil s’exerce sans cesse à manier des formes innombrables ; l’image, dans sa majeure partie, n’est pas une impression des sens, mais un produit de l’imagination. Les sens ne fournissent que de menus motifs que nous développons ensuite» Extrait de La Volonté de puissance, Nietzsche.

Les signes vont affilier des valeurs culturelles et interprétations cognitives, ainsi les couleurs et formes auront diverses significations selon leurs utilisations et applications dans le graphisme.

“Rien dans l’intelligence qui ne soit passé par nos sens.” Aristote

B / La place du Graphisme

Selon Annick Lantenois, « le design graphique peut être défini comme le traitement formel des informations et des savoirs. Le designer graphique est alors un médiateur qui agit sur les conditions de réception et d’appropriation des informations et des savoirs qu’il met en forme. » Selon ses domaines d’intervention (illustration, affiche, communication d’entreprise, presse, édition, packaging, publicité, design web, signalétique, identité visuelle, etc.), il fait partie de la chaîne graphique liée à l’imprimerie ou à d’autres médias.

Julie Ramos dans Nostalgie de l’unité (voir fiche de lecture), démontre qu’il existe des liens entre les rapports auditif et visuel, nature et musique. Le visuel ne produit pas directement du son, mais c’est notre perception, l’imagination se manifeste pour associer des sens entre eux. L’expression « Lire un album » met en évidence cette relation, ici le terme lire s’assimile à celui d’écoute. Le traitement d’une image, d’un texte peut introduire des sonorités par un visuel (voir partie Atc). Dia golosa est un ouvrage mettant en scène les poèmes de Maïakovski par une composition graphique d’El Lissitzky. Ce livre constructiviste est conçu pour être lu à haute voix. Le choix la taille, la graisse et du style de police, l’utilisation de formes géométriques, les couleurs et l’utilisation de l’espace dans la page, tous ces éléments procure une dimension sonore.
La multisensorialité peut aussi bien se retranscrire en troublant les sens par association et dissociation. Les signes permettent d’associer un sens à des sens. Le sang est associé à la couleur rouge qui elle-même évoque la notion de chaleur, mais si l’on parle d’un reptile au sang-froid, notre cerveau va logiquement l’allier au bleu qui est déterminé comme la couleur du froid. Pourtant cet animal n’est pas véritablement composé de sang bleu. Dans notre société, le blanc est symbole de simplicité, d’innocence et de pureté, mais aussi de la connaissance, or dans en Inde il est associé aux rites funéraires, le graphiste doit prendre en compte l’impact qu’une connotation visuelle peut produire.

Les sens peuvent aussi intégrés dans les formes de lecture par des processus cognitifs. À vision éducative, des matières sont incorporées physiquement dans des livres, favorisant un apprentissage par le toucher. Ce procédé est généralement retrouvé dans la littérature jeunesse et vise à l’éveil des sens pour une meilleure connaissance de soi, mais également de développer ceux peu ou inconsciemment utilisés dans notre quotidien. Cibler un sens particulier et l’adapter aux supports de lecture, peut atténuer des difficultés liées à des handicaps visuels. Dans les cas de malvoyance, de déficience visuelle ou de non voyance certains dispositifs sont mis en place pour améliorer leur quotidien.
Quels sont les moyens existant?
- Le braille
- L’adaptation des textes par l’agrandissement des caractères
- L’enregistrement audio

Ces modes d’adaptation restent très minoritaires sur le marché de l’édition car ils ne concernent qu’un pourcentage réduit de la population, pas assez rentable pour rechercher et développer d’autres solutions et les coûts de production restent très élevé. On remarque que ces moyens peuvent changer le quotidien de ces personnes, notamment avec l’apparition du numérique. Impliquant par son arrivée de nouveaux dispositifs et de nouvelles possibilités, la notion d’interactivité intervient de façon plus ludique donnant moyen au lecteur de devenir acteur de sa propre lecture.

Partie III

Les Nouvelles Technologies: Une Nouvelle Conscience

À l’arrivée du numérique, les nouvelles technologies bouleversent totalement nos habitudes et nos quotidiens. Aujourd’hui, la plupart des gens sont équipés d’un smartphone, d’un ordinateur, etc. Ces objets viennent modifier nos usages. Le téléphone, par exemple, que l’on a fréquemment sur soi et qui est connecté à internet, nous donne une mobilité et un accès à l’information quasi constant. Ces outils sont apprivoiser et utiliser d’une manière rapide et phénoménale, ils touchent toutes les générations. Cela peut s’expliquer par notre société où tout devient de plus en plus rapide et où tout doit être accessible. Les médias traditionnels comme les journaux, la télévision et les radios doivent s’adapter pour ne pas sombrer dans l’oublie ou l’obsolescence. Les journaux ont pris pour parti la création d’applications et de sites web pour diffuser leurs contenus. Ces articles boostés par le numérique, sont à la fois plus complets, parce ils ont la possibilité d’être actualisés en fonction des évènements en temps réel, et plus attractifs. La lecture est ici augmentée par l’ajout de vidéos, gifs, et autres éléments interactifs. Ce n’est pas seulement le support qui est modifié, mais également son contenu, ou du moins la manière dont il est proposé.
La lecture numérique se fait par tablette ou par le smartphone, elle engendre des modifications corporelles et cognitives sur notre lecture. Si toutefois, ces supports permettent de stocker un nombre d’informations plus élevé qu’un simple livre papier, l’usage de l’écran de façon excessive engendre d’autres problèmes. De nombreuses études ont pu démontrer que les écrans occasionnaient de la fatigue et des douleurs notamment liées aux yeux, aux épaules, au dos et aux jambes. Le support génère un impact sur notre corps.

Par ailleurs, passer du papier à l’écran, modifie notre lecture de différentes manières. Le rythme s’accélère et notre attention est moins efficace. Mais ce n’est pas pour autant que notre mémoire est affectée, c’est notre adaptation de ces supports qui n’est pas efficacement utilisée. Ce n’est donc pas une question d’intellect et de mémoire, mais une question de repères spatio-temporels et de corps. Quand nous lisons sur un livre électronique, notre rapport à l’espace est différent que sur un livre papier. Notre approche du volume, de l’épaisseur, des séquences mêmes de l’histoire est perturbée par l’absence des indices spatio-temporels que nous recevions du toucher du livre papier.
Les pratiques de lecture sont ancrées dans une culture elle-même liée au papier, mais dans le monde numérique ce rapport à la matérialité est tout autre. Il est donc nécessaire de construire cette culture relative au numérique. Cette lecture doit alors commencer à penser sa corporalité... Nos corps qui s’affaissent derrière nos écrans nous le réclament déjà.

«En général, les nouvelles technologies minimisent l’investissement corporel. Faciliter la vie des individus consiste souvent à réduire l’énergie physique dépensée», souligne Jean-Luc Velay.

Certaines personnes, comme les éditions volumiques, tendent à amplifier ce rapport au corps, en incorporant du numérique dans des supports papiers. Cette hybridation du réel et du virtuel, du papier et des outils numériques, semble pourvoir apporter certaines réponses. L’incorporation de ces nouveaux systèmes à des supports plus classiques permet au lecteur d’interagir avec le contenu, il n’est pas seulement témoin de ce qu’il se passe mais acteur de sa propre lecture. Les nouvelles technologies, par leurs apports, intègrent et mettent en place des système plus enclins avec divers sens. Ainsi la dimension sonore peut réellement s’intégrer au papier en combinant visuel et toucher.
Ces nouvelles technologies permettent d’utiliser des dispositifs interactifs ciblés et ainsi développer d’autres acuités sensorielles. Le livre de demain, sera celui qui prendra en compte les faiblesses afin de renforcer les atouts de l’individu lecteur. Elles offrent de nouvelles opportunités. Le papier devient complément à part entière du digital et non plus comme support par défaut.

Quelles sont les nouveaux supports de médiation de la lecture aujourd’hui?
° La réalité augmentée, qui désigne les systèmes informatiques qui rendent possible la superposition d’un modèle virtuel 3D ou 2D à la perception que nous avons naturellement de la réalité et ceci en temps réel. Elle s’applique aussi bien à la perception visuelle (superposition d’image virtuelle aux images réelles) qu’aux perceptions proprioceptives comme les perceptions tactiles ou auditives.
° Le livre augmenté, il permet d’associer l’édition classique au numérique. Le but, créer un dispositif hybride de lecture. Le but des Editions Volumiques est de travailler sur le papier et la mécanique du livre, mais en le pensant comme un système informatique ou interactif.
° La lecture augmentée, Ensory Fiction est créé au MIT, son but et de nous faire vivre les émotions des héros de fiction. Muni d’un gilet connecté avec des «capteurs d’émotions», le lecteur peut éprouver physiquement les sensations ressenties par les personnages du roman, lui permettant d’être totalement immergé dans l’univers de l’histoire

« En insufflant de la technologie au livre papier, on crée de l’inédit» Étienne Mineur

Ces pratiques innovantes apportent une nouvelle conscience du corps, elles suggèrent la relecture des supports et créent de nouveaux possibles grâce aux milieux techniques.

Conclusion

Au premier abord, la lecture ne met en jeu qu’un seul sens, la vision, pourtant ce n’est qu’une apparence.
Le corps est indissociable de la lecture et si celle-ci peut changer de contenus, de supports, de formats, l’individu lecteur sera toujours présent. Le terme de livre est lui-même associé à des notions physique de l’homme, « un livre de poche », « un manuel ». Pourtant, le numérique à modifié considérablement ce support, l’intervention des ordinateurs, tablettes et smartphones changent les usages et pratiques de lecture.
Si le livre papier, dans sa configuration a très peu changé depuis l’imprimerie, les supports de lecture numérique reprennent eux des codes associés au papier. Il n’y a de véritable innovation que l’intégration des supports papier avec des pratiques numériques car elle a ouvert le champ des possibilités dans le domaine de l’interaction. Ces échanges entre réel et numérique viennent également souligner l’interactivité déjà existante. Tous ces moyens interactifs étaient présent, mais ce sont les nouvelles technologies qui permettent cette prise de conscience et qui ne s’effectue que maintenant.
L’intégration des sens et l’échange avec le lecteur constituaient déjà une part importante dans une lecture dite plus classique. On peut dire que l’association de sens avec le support papier passe par notre interprétation et notre imaginaire. La gestion du visuel dans une page permet au graphisme d’induire de la sonorité là où elle ne pourrait exister habituellement. On parle alors d’image sonore. Le texte, la mise en page ne dégagent par réellement de sons, mais le provoquent par leur conception graphique. Nos sens peuvent être tout aussi sollicités quand ils sont troublés par des jeux d’association de sens, mais aussi de rupture entre le sens et la connotation.
Tandis que le numérique à tendance à intégrer de manière réel et physique les sens dans certains dispositifs. Les utilisations de capteurs, d’encre conductrice permettent de lier corporellement un événement déclencheur au corps lecteur. Ces procédés sont libres d’appropriation et chacun peut choisir à sa manière propre comment il souhaite augmenter son contenu. La multisensorialité dans la lecture invite alors à une reconnaissance de notre propre corps.
N’est-il pas temps de proposer une nouvelle définition de la lecture et de la manière dont elle est mise en oeuvre? Les nouveaux médias et les nouvelles technologies nous permettant de nous décloisonner du support. La lecture pourrait peut-être alors être spatiale et s’intégrer dans notre environnement?

Arts, Techniques et Civilisations

Comment une image peut-elle provoquer du son et le son induire de l’image?

L’image et le son sont dans bien des cas complémentaires. La lecture peut être modifiée par des apports sensoriels, ainsi l’oeil peut provoquer du son et le son amener de l’image. Mais de quelles manières? De nombreuses oeuvres mettent en corrélation ces deux sens, la vue et l’ouïe, permettant une meilleure compréhension et une émotion plus intense.

L’oralité peut être figurée par de nombreux système graphique, comme la ponctuation, la police de caractère, la taille, l’épaisseur ou encore l’utisation de l’espace dans la page. En 1897, Mallarmé publie «Un coup de dés jamais n’abolira le hasard». Ce poème composé en «vers libre» est hors norme, il s’étale sur onze doubles pages et joue de toutes les variations typographiques taille, majuscules, italique. « Cet emploi à nu de la pensée avec retraits, prolongements, fuites, ou son dessin même, résulte, pour qui veut lire à haute voix, une partition » Mallarmé.
La ponctuation, l’utilisation des blancs dans la page renvoie directement à notre utilisation du langage, du chant, du récit.. Ici la lettre même peut révéler sa sonorité enfouie et la simultanéité des sensations rendent cette composition audible. On remarque que certains mots sont écrits en capitale et de taille différente, ce rapport d’échelle donne une importance plus grande à ce mot par rapport à un autre écrit en minuscule et d’une taille plus petite. Cela permet d’induire une intonation différente de ces mots dans notre lecture. Inconsciemment le mot en capitale serait prononcé plus fort, il semble logique de lui donner une importance similaire dans notre diction que celle repérée dans la page. La mise en page n’est pas choisie au hasard, l’utilisation des blancs sert à mettre en relief des éléments plus importants, de donner du rythme aux mots et insinue des temps de pause dans la lecture. Le lecteur n’est plus seulement lecteur mais auditeur de sa propre lecture, il est visuellement possible de comprendre les rythmes, intonations et pauses en regardant la composition de la page et les choix typographiques.
Le livre du constructiviste El Lissitzky, Dlia golosa (1923) est composé par des créations typographiques et des poèmes de Maïakovski. Ces poèmes constitués pour être lus à haute voix, El Lissitzky tente d’obtenir une synthèse visuelle, auditive et textuelle par une construction graphique de ce recueil.
«Mes pages se tiennent dans la même relation avec les poèmes, comme un piano accompagnant un violon. Comme le poète unit le concept et le son, j’ai essayé de créer une unité équivalente à l’aide de la poésie et de la typographie.. » Ce livre prend la forme d’un annuaire téléphonique, des onglets sont intégrés dans le livre pour faciliter la recherche de poèmes: dans les index, les lettres sont remplacées par des symboles graphiques et les titres des poèmes. Chaque composition visuelle contribue à une identité symbolique d’un poème, la construction des images se réalise par la combinaison de polices de caractères de différentes tailles, imprimés en rouge et noir.
La construction graphique nous transmet différents rythmes de lecture, ainsi que des sensations telles que l’excitation ou la fureur. Le rouge et le noir donnent un côté brutal, révolutionnaire et semblent s’imposer avec conviction, la graisse et la taille des typographies connotent une intonation plus grave, plus forte du mot. Les polices de caractères différencient des pays différents et la superposition de lettres donne de la profondeur et de l’intensité à l’image. La lettre est utilisée comme un des éléments géométriques et peut remplacer un mot.
Ce livre est une collaboration entre le poète et l’artiste, Lissitzky, fournit une interprétation visuelle des poèmes de Maïakovski en permettant une perception simultanée d’une image en son. Ce procédé visuel nous renvoie à une interprétation de ce qui nous semble audible.

Une analogie existe donc d’une image vers un son, mais l’inverse est-il possible? L’analyse du conte musical Pierre et le Loup (Петя и волк en russe)* pourrait répondre à cette question. Créé à l’origine en 1936 pour faire découvrir aux enfants les différents instruments qui composent un orchestre, il s’est décliné sur de nombreux supports. Nous nous intéresserons à la version française en livre disque pour des questions d’accès au support.
On remarque ici qu’il existe un dialogue entre sons et images, le texte vient s’adapter au récit, tandis que les visuels complètent la partie musicale. L’oeuvre est alternée entre les paroles du narrateur et l’orchestre qui vient ponctuer le récit d’intermèdes musicaux.

Le récit commence par une présentation générale des différents protagonistes, ils sont personnifiés par des instruments qui décrivent leurs tempéraments et les particularités:
• l’oiseau : l’agilité — virtuosité de l’oiseau — flûte traversière et sa sonorité cristalline
• le canard : le pataud — bucolique du canard — hautbois et son caractère pastoral
• le chat : la félinité — légèreté du chat — clarinette et son espièglerie naturelle
• le grand-père : le bougonnement — caustique du grand-père — basson et sa voix profonde
• le loup : le lugubre — envoûtant du loup — trois cors et ses accords sombres
• les chasseurs : le clinquant — réjouissance des chasseurs — cuivres / percussions et leur marche triomphale (les coups de feu sont illustrés par des coups de timbales et de grosse caisse)
• Pierre : le spontané — simplicité de Pierre — quatuor à cordes et sa candeur naïve.
Les instruments ne sont en aucun cas choisis au hasard, ils représentent par leur particularité le caractère du personnage associé. Cette représentation est possible par nos croyances collectives qui par nos ressentis permet d’associer le concept d’un son à une image. Visuellement comme auditivement, le narrateur annonce le personnage suivi de l’écoute ou de la présentation visuelle de l’instrument qui le complète. Graphiquement un texte d’annonce est suivi du dessin du personnage en couleurs et enfin d’un dessin simplifié de l’instrument. Ce dernier est plus sobre vient comme moyen d’unité, seuls les contours apparaissent en noir.
Des couleurs primaires, une technique aux encres et un style simplifié sont utilisés afin de garder un esprit enfantin et à ce que le réel ne prenne pas la place sur notre imaginaire. Par la suite, le narrateur débute l’histoire, puis laisse l’orchestre s’exprimer. En se répondant à tour de rôle, le conteur annonce l’action, puis permet au spectateur de se l’imaginer. Il y a une similitude sonore et visuelle, puisque le petit livret fonctionne de la même manière graphique. L’ambiance sonore et une narration réduite associées aux quelques visuelles concèdent à notre imaginaire une représentation de l’action. Évidement, la lecture est possible sans l’écoute du cd, mais le support apparait beaucoup plus fade sans l’introduction de l’ambiance sonore. Par ailleurs, l’écoute seule du cd laisse libre cours à notre imaginaire d’interpréter l’histoire. La corrélation de ces éléments apparait comme une augmentation de l’oeuvre originale qui se répond de façon visuelle est sonore.

Même si le son et l’image se complètent, la bonne compréhension de l’histoire est fortement aidée par le récit introduit par le narrateur. Est-il possible alors de comprendre une narration seulement par le son et l’image? En 1935, Walt Disney Productions sort un court métrage nommé Music Land * réalisé dans le cadre des Silly Symphony. L’approche visuelle et sonore est légèrement différente de l’exemple précèdent, ici chaque personnage est un instrument et les dialogues ne sont pas parlés mais joués. En effet, les instruments sont animés comme de vrais personnes et leurs échanges se réalisent par des notes ou des mélodies. La composition de cette animation est faite de manière à être en corrélation avec la musique, l’un ne peut être dissocié de l’autre sans que la compréhension ne soit affectée. L’expression des personnages, leurs tempéraments, leurs ressentis et l’atmosphère de la scène sont exprimés par des mélodies plus graves, plus cadencées, plus amples.. Le plus souvent se sont des extraits de musiques originales. Il y a une grande bataille, celle de l’ordre, de la rigueur représentée par la musique Classique contre le désordre, de l’improvisation qui apparaissent sous la forme du Jazz. Dans le un registre identique, les studios Disney produisent Fantasia en 1940, un film expérimental visant à mêler des illustrations et des animations, aux plus grands chef-d’oeuvres de musique classique. Ce long-métrage apparait comme « une nouvelle forme de représentation dans l’art ». Les sept séquences animées viennent composer huit extraits musicaux joués par l’orchestre de Philadelphie sous la direction de Leopold Stokowski. Dans la seconde séquence, l’évocation des quatre saisons se réalise sur Casse-Noisette de Piotr Ilitch Tchaïkoski où différents types de ballets sont présents. Il y a une ferme volonté de ne pas afficher de narration trop figurative afin que le visuel ne surpasse pas l’écoute musicale. Les formes non abstraites tels que les fleurs, la nature et les êtres vivants ne racontent pas une histoire mais semble simplement jouer avec la musique. Nous pouvons dire que c’est un « opéra » visuel et auditif, la performance graphique et sonore mettent en symbiose les rythmes et cadences avec les animations.

À travers ces différentes oeuvres nous avons pu constater que la vue et l’ouïe sont irrémédiablement liées. Les apports sensoriels permettent un enrichissement de l’oeuvre, notre perception de la lecture sera différente, tout autant que l’écoute d’une musique s’il y a un complément visuel. Les nouvelles technologies semblent pouvoir combiner plus facilement ces sens. Le livre connecté tel que Le livre Son ore des Éditions Volumiques, reprend le conte musical de Pierre et le Loup en associant des visuels abstraits et de l’interaction sonore. En glissant un smartphone tactile dans le livre, la pression faite par le doigt sur des emplacement indiqués visuellement permet de déclencher des sons enregistrés préalablement. L’utilisation du texte, de dessins, du son et une dimension tactile constituent une narration interactive. La combinaison de ces systèmes induisent et révèlent de nouvelles sensations de lecture par la médiation de nos différents sens.

* Sergueï Prokofiev (1891-1953) en est le compositeur, le texte et la musique ont été composé en 1936 durant l’année de son retour définitif en URSS.
* Ce film est particulier car il marque la découverte d’une nouvelle technique d’animation, la couleur noire transparente conçu pour réaliser les ombres appelée «peinture ombre» (shadow paint).La «peinture ombre» n’est pas une véritable peinture c’est en réalité une technique visuelle. Elle fut découverte durant les séances de photographie de cellulos pour le court métrage. Le principe est de photographier les ombres à part en exposition partielle puis avec la même bande on re-photographie le reste de la scène mais sans les ombres. Les teintes des ombrages sont alors beaucoup plus naturelles. Avant d’entrer dans la prison-métronome, le prince était entouré de personnages, de simples ombres noires peintes sur des cellulos. Lors du tournage dans la prison, un lieu sombre, la couleur du prince est devenue plus sombre en raison des personnages-ombres doublement exposées. Des tests furent donc réalisés et le principe fut généralisé.

Fiche de Lecture

Chapitre III- Analogies (2): Nature et musique

Nostalgie de l’unité
Paysage et Musique dans la peinture de P.O.Runge et C.D.Friedrich
Julie Ramos

SOMMAIRE:
- Lien entre Terre et Musique
- La quête de Franz Sternbald
- La musique des sphères
- L’âme musicale
- La synesthésie
- L’analogie cosmique et artistique.

FICHE:
Julie Ramos
Maître de conférences
Université
Paris 1 – Panthéon - Sorbonne
Histoire culturelle et sociale de l’art (HiCSA)
e-mail: julie.ramos@free.fr

Julie Ramos est maître de conférences en histoire de l'art à l'université de Paris 1- Panthéon-Sorbonne. Auteur d'une thèse de doctorat sur les rapports entre peinture de paysage et musique dans le romantisme allemand, elle a notamment contribué aux catalogues L'invention du sentiment, aux sources du romantisme (Musée de la musique, 2002) et Aux origines de l'abstraction (Musée d'Orsay, 2003), exposition dont elle a assuré avec Georges Roque le conseil scientifique. Elle poursuit actuellement ses recherches sur la synthèse des arts au XIXe siècle et travaille à une étude sur l'art allemand en Europe durant l'occupation napoléonienne.
Ce livre démontre que, parvenir à la synthèse des arts est un des idéaux constitutifs du romantisme, en ouvrant la voie au concept wagnérien d'œuvre d'art totale, ou Gesamtkunstwerk. L'ouvrage examine la manière dont, autour de 1800 en Allemagne, cet idéal se cristallise dans la volonté des artistes et des écrivains de rapprocher la peinture de la musique, un rapprochement qui remet en question le cloisonnement des arts. Runge et Friedrich participent à cette quête par leurs réflexions et leurs œuvres.

Pour cette chercheuse le lien entre la nature et la musique est fondamentale. Par l’aquarelle de Carl Gustav Carus (planche n°10, 1834), elle observe une analogie entre nature, musique et architecture. Cette grotte de Fingal, découverte en 1773, est constituée d’immenses colonnes de basalte. Ce peintre allemand tente une représentation musicale de la cavité sous la forme d’un orgue. Il tente d’extraire ces phénomènes sonores dus à la résonance des gouttes d’eau et au ressac des vagues. Par la forme artistique, il développe une synthèse entre le réel et la représentation mythique qu’il s’en fait. Les notions d’échanges entre musicalité et nature sont renforcées par les métaphores que Tieck évoquent dans les Pérégrinations de Franz Sternbald. L’éclosion du printemps est comparée à un chant mélodieux par les vibrations d’une harpe, l’auditif se rapproche du visuel, mais également le sonore et l’extrasonore. Julie Ramos souligne que si le roman de Tieck apparait comme initiateur de la peinture, une grande partie est dédiée à la musique. Deux grands débats apparaissent: D’une part, la brièveté de la poésie et de la musique attribue une supériorité à la peinture dans les arts, comme la vue sur l’ouïe. Il ne s’agit pas de venir mimer des bruits naturels mais de traduire une musique cosmique. Cette transmusicalité résulte de la polysémie musicale produite dans la nature que semble initier le paysage. D’autre part, la peinture se limite au champ visuel, une constante temporelle est présente mais la capacité de représentation du monde se trouve freinée par le manque matériel et figée. Si la musique est plus éloignée de la nature dans les apparences, elle l’est plus proche par ses origines et ainsi surpasse la représentation visuelle. Le poète Rudolf Florestan semble conclure que la musique, la poésie et la peinture sont bien souvent liées et empruntent des voies similaires, en particulier dans la peinture de paysage. Le choix du paysage apparait comme primordial pour espérer « musicaliser » son art.
Toujours dans le rapport au monde, l’harmonie des sphères est une théorie antique concernant les rapports entre les mouvements des corps célestes comme une forme de musique. Elle n’est pas vraiment audible, mais perceptible sans être sonore, elle est « régie par des lois numériques et des proportions harmoniques ». La musique céleste traduit les sonorités venues du ciel. Dans le même ordre d’idée, la harpe éolienne vient symboliser l’harmonie céleste et dévoile la dimension aléatoire de l’activité cosmique. Cet instrument « autophone » dévoile des sons se dégageant du passage du vent et la non intervention de l’Homme sur l’objet, lui confère une supériorité dans l’évocation de nature musicienne. La dimension aléatoire de l’activité cosmique nous révèle la sonorité du paysage environnant au moment donné. Sont alors soulevées les questions suivantes, par quels moyens distingue-t-on le son du bruit? Où finit le bruit, où commence le son? Pour Novalis, c’est notre perception qui dépend l’organisation des individus. Tous les sons produits par la nature sont dénués d’esprit, c’est notre sensibilité qui en dégage une harmonie, c’est l’âme musicale.
L’aptitude de l’âme à ce mettre en accord avec la nature est signifiée par le terme Stimmung, il peut être traduit par l’humeur, l’ambiance. Pourtant son étymologie relève de l’accord des instruments (gestimmt sein), à la fin de XVIIIe et XIXe siècles, ce terme s’articule à l’invention des expressions Gemütstimmung et Stimmungslanschaft signifiant de manière réductrice « état d’âme » et « paysage de l’âme ». Selon Novalis, « Stimmung » désigne les rapports musicaux et l’âme, si la lumière, les sons et les facultés humaines sont liés, la perception d’une unité de nature est solidaire à une nature unitaire de la perception. Ce n’est qu’à partir de 1860 que l’interaction des sens auditifs et visuels sont identifiés par l’audition colorée et le phénomène de synesthésie. Pour Runge, l’analogie du voir et de l’entente peut créer une fusion entre musique et peinture, soit les sons et les couleurs. « L’interaction sensorielle est l’une des conditions de la fusion des arts »
L’imagination se manifeste comme un sixième sens qui peut remplacer les autres sens, c’est l’analogie qui conditionne notre régie de représentation. Le pouvoir de l’image, donne à une oeuvre le moyen d’agir sur son public par une analogie intérieure. .

Il existe des liens étroits entre la nature et la musique, ces phénomènes sont réciproques et peuvent également se retrouver dans les arts. Cet extrait d’ouvrage tend à révéler l’analogie intime du sens de la vue et de l’ouïe, ce ne sont pas des découvertes récentes et les débats sont toujours d’actualité même si certains sont avérés.

Entretiens

Marion Estavoyer

Elle travaille au sein du LFO résonance numérique / Zinc. Elle est notamment à l’origine du projet du Véloglyphe.

Par rapports aux projets que tu as pu réaliser dans tes études ou en dehors (zinc, etc..), quel est le rôle et la place du corps dans tes projets? Comment l’impliques-tu, et comment le considères-tu?

M-E: Ce qui m’intéressait dans ce rapport, c’est avant tout d’avoir fait une formation qui n’était pas désignée comme du design graphique, mais comme de la communication visuelle, donc exclusivement dirigée vers le sens visuel et du coup l’œil. Ce qui m’intéressait c’était de décloisonner ce rapport à la communication en essayant d’aller chercher d’autres manières, par exemple avec le tactile d’avoir le rapport à l’objet, mais aussi le rapport au son, à la mobilité et au corps dans sa globalité. À travers ça, je pouvais sortir d’une dimension trop « print », peut être trop plane, pour de me diriger dans le rapport au numérique et comment le print et le numérique pouvaient cohabiter pour essayer d’amplifier le support ou l’outil en vue de solliciter, d’exploiter tout notre corps.

Pour toi quel est l’intérêt d’une médiation avec les nouvelles technologies et l’intégration du numérique? Qu’est-ce que ces points apportent pour toi?

M-E: Déjà, d’ouvrir les possibles, de ne pas se restreindre à un type de support et un type de sens, mais de pouvoir être dans un rapport au spectateur, à l’auteur. Ne pas être simplement sur une chaise et regarder, mais être dans un rapport d’actions à ce que l’on va voir, toucher, sentir, entendre. Du coup, nous ne sommes pas passif à ce que nous avons en face de nous. Éventuellement pour aller plus loin que l’outil, l’objet ou le support soit en capacité de se déplacer lui-même vers le public et que ce ne soit pas systématiquement l’inverse. Que l’on ne soit pas sur quelque chose de figé, d’attendu mais qui soit en capacité de se déplacer en permanence pour aller chercher les gens là où on a pas pas l’habitude de les attendre. Sortir des encarts JC Ducaux et des arrêts de bus et des panneaux 4x3 qui nous sont imposés sur un trajet quotidien.

Pour toi la relation au corps et au numérique permet alors d’amplifier et d’ouvrir sur de plus grandes possibilités?

M-E: Le numérique seul, pas obligatoirement dans une finalité numérique, parce que le numérique peut être à l’usage de quelque chose qui sera complètement analogique donc on est à la fois dans le rapport à l’interactivité, type arduino, processing, etc, mais aussi comment le numérique en tant qu’outil va nous permettre de recréer de l’objet, d’autres outils pour exploiter tout ça. Et en l’occurence sur la question du vélo, c’était ça, comment le numérique m’a permis de créer l’intégralité de mon dispositif (véloglyphe) et de le rendre viable, en l’occurence dans l’espace public. Et ensuite, au-delà de ça, le rapport au corps, à la fois virtuel et physique, dans le sens où le numérique permet de repartager tout ça. Une fois que tes fichiers, que ton support ou l’intégralité de ton objet est dans un format numérique il pourra prendre toutes les formes possibles derrière s’il est réinvesti. Par exemple, partager sur un wiki, sur un autre espace où les gens pourront s’en saisir d’une manière aussi différente. Du coup un rapport qui circule et qui se diffuse pas seulement au niveau local, mais au niveau national et international.

Aujourd’hui travailles-tu toujours sur ces questions?

M-E: En effet, je travaille toujours sur ces questions là, je poursuis la question du vélo qui me parait être un outil assez intéressant car il est à la fois populaire, mobile et des vertus diverses, à la fois sociale, environnementale, sportive, etc. J’essaye de développer l’outil analogique du vélo, par le biais du numérique, pour amplifier cette mobilité et se jouer de la manière dont l’outil va permettre d’arpenter n’importe quel support. Du coup, je travaille sur un projet qui s’appelle le vélokino, il permet de faire de la projection sons et vidéos en pédalant et du coup, comment cet outil va pouvoir nous permettre de se jouer du support de l’espace public? De venir directement en interaction à la fois avec le public, avec son contexte et ses usages, et met en action le corps du participant et des personnes autour.

Dans ce projet, le rapport au corps et à l’individu acteur est-il mis en place par l’interaction avec son environnement ?

M-E: Oui, ici on a un investissement assez global du corps car il sollicite à la fois le fait de pédaler pour diffuser, mais aussi le fait de voir ce que tu fais, d’écouter et d’être contextualisé dans le territoire, l’espace de la ville.


Le véloglyphe: http://leveloglyphe.tumblr.com/

Axelle Benaich

Elle est la fondatrice et la codirectrice de l’association Design the Future Now / La Fabulerie.

Comment la Fabulerie utilise et intègre les médiations numérique dans ses projet? Par quels moyens? Estimes-tu qu’il existe un rapport au corps dans ces médiations? De quelles manières intégrez-vous les sens, de quelles façons interagissent-ils et avec quels outils?

A-B: La trame narrative de la Fabulerie, elle est plutôt orientée sur le futur, sur la façon dont on se l’imagine, la façon dont on le désir et la façon dont on se met en mouvement pour le mettre en œuvre. À partir de là, on s’appuie sur le numérique, sur le design et sur d’autres choses pour raconter des histoires qu’on espère vraies un jour. Donc, il y a un fond et du coup le numérique est en appuie sur ces histoires là. Forcément, si on imagine le futur, on se l’imagine dans un quotidien avec lequel on interagit, dans lequel on se déplace, dans lequel nos sens sont en éveil, on va se déplacer, travailler, on va boire, on va discuter, on va souffrir, on va être amoureux, etc.. et du coup comment restituer une idée que l’on aurait pour le futur ? De ma façon la plus perceptible possible, c’est aujourd’hui par le numérique.
Là par exemple, la semaine dernière nous avons pu faire un stage Inventarium où les gamins avaient pour contrainte de travailler autour des mots de la francophonie, on avait un cadre imposé et on leur a demandé d’imaginer des objets. Par exemple un des groupes a imaginé qu’en 2220, nous aurions des rhinocéros comme animal de compagnie, que la nuit on serait un peu agité et que l’on se réveillerait d’un coup pour aller voir notre animal de compagnie qui gambaderait. Du coup ils ont imaginé un dispositif qui permet de capter à quelle distance se trouve le rhinocéros et de l’appeler. Ça nous l’avons prototypé en « vrai » avec un capteur infrarouge et entre autre des lumières. Finalement, c’est là où quelque part on se donne des prétextes pour remettre en scène le futur et les interactions que l’on pourrait y avoir.

Donc l’inventarium ce sont des ateliers uniquement avec des enfants?

A-B: Surtout des adolescents.

L’intérêt de travailler avec des ados sur les outils numériques, rejoint pour vous une part d’apprentissage, de transmission des nouvelles médiations et de nouvelles techniques?

A-B: En effet, c’est de leur offrir des alternatives en tout cas. Leur montrer qu’aujourd’hui ce qu’ils ont comme appareils numériques et comme fonctionnalités numériques autour d’eux, ce qu’ils manipulent est lié à de la consommation et c’est ce qu’ils leur est proposé, mais qu’ils peuvent eux aussi très bien imaginer des fonctions qui colleront davantage à leurs besoins, qu’on ne peut pas anticiper aujourd’hui. D’une part, parce que nous ne sommes pas à leurs place et d’autre part c’est aussi pour eux qu’ils imaginent ça. Et le numérique du coup c’est quelque chose avec lequel certains sont à l’aise, mais dans des usages très restreints. Donc, c’est leur donner à voir les possibles, c’est leur montrer qu’en terme de savoir-faire ça s’acquière avec un peu de curiosité et de pugnacité, c’est des choses qui sont à leur portée et qu’en plus des technologies, aujourd’hui, certaines, en tout les cas avec le courant DIY, se simplifient pour se mettre au service de ces narrations. Mais il faut d’abord qu’ils imaginent et qu’ils se posent des questions avant de vouloir pratiquer. C’est pour ça que Maxime Paulet, qui a animé le stage, nous a fait réfléchir pendant trois jours avant de pouvoir produire, ils ont utilisés les machines du Fab lab pour d’une part prototyper l’objet physique (pour le prendre en main, voir sa maniabilité) et après travailler l’interaction.
Je trouve que le numérique est intéressant aussi dans la fonction prototype pour justement essayer, bidouiller et inventer des choses, mais aussi pour donner à voir. Par exemple, on a un petit livret, on va pouvoir le mettre en ligne, le diffuser, mais également on fait une expo à La Criée pour que les gens viennent voir les maquettes et interagir avec.

Donc vous garder toujours ce lien entre le réel et le numérique dans vos projets? Cette corporalité est importante?

A-B: Oui. Je trouve que tout ce qui est dans le courant de la data visualisation, comme pour moi avoir un schéma ç’est intéressant mais on peut aller beaucoup plus loin aujourd’hui, sur des formes d’objets qui sont faits en général à partir de données. Donc faire en sorte que le numérique multiplie nos portes d’accès aux savoirs, aux histoires et aux émotions. On a un besoin d’être dans le mouvement. Le mouvement c’est la vie on le sait, donc est-ce qu’on a envie plus tard d’être simplement passif devant un écran qui va nous donner de l’information ou non… Je pense qu’on a besoin d’être dans l’interaction, le mouvement, le poul. Donc oui c’est important.

Dans les projets de la Fabulerie, quels sont les moyens, les manières, les technologies que vous utilisez le plus en situation?

A-B: Alors il y a nos cinq domaine d’usages*, effectivement en général on va se concentrer sur des objets très simples, ouverts et documentés pour permettre la dissémination, tout ça… qu’il n’y est pas de freins dans l’accès aux technologies mais plutôt qu’on sente le potentiel de tout ça. Par exemple, la touchBoard qu’on utilise beaucoup, on utilise beaucoup tout ce qui est image sous stl, cookiecasters, des applications comme ça qui permettent facilement de passer du 2D à la 3D, de passer de la 3D à la 2D, etc..
Donc en gros pour moi ce sont des ressources passerelles, tous nos dispositifs sur lesquels on travaille en ce moment sont conçus de cette manière. Ce ne sont que des objets passerelles, soit à destination direct du public, soit à destination des médiateurs qui eux-même vont pouvoir sur ces dispositifs adapter, raconter, travailler une histoire en se mettant de côte la contrainte technologique.
On essaye d’aller et de digérer des technologies comme l’occlus ou on revient à des technologies très simples comme le cartomaton, rien de très compliqué, c’est de l’animation flash, c’est hyper ancien. On aime tout ce qui est stable, pas cher et ouvert.

C’est intéressant parce que tu as parlé de notion de transmettre, de documenter et de partager, tu penses que le numérique apporte une facilité à ces actions pour les conserver et les communiquer à un plus grand cercle d’individus?

A-B: Oui, forcément avec l’arrivée du web 2.0 tout ça, on est sur des mouvements où on veut tous proposer des choses et on veut tous accéder à de l’information, finalement on horizontalise l’accès aux connaissances, on est sur des logiques de pair à pair où la reconnaissance est un moteur de motivation. Un moment comment on redonne confiance aussi aux générations, que ce soit les jeunes ou les séniors.
Quelque part, aujourd’hui créer quelque chose et le partager c’est avoir des retours. Un sociologue, Guillaume Pérocheau, qui nous dit toujours que les médias sociaux en fait ce ne sont que de l’épouillage, on continue à avoir des marques de sociabilité qui passent par la reconnaissance de l’autre. Du coup, oui, c’est de la diffusion grand public sans forcément se penser que l’on va communiquer et qu’un japonais va accéder à ce que l’on fait, mais vraiment se dire que l’on va pouvoir le partager à notre quartier, à notre famille, à nos amis et que l’on a soi-même et autour de nous un petit univers que l’on trimballe… et ça, ça donne à la fois des ressources pour multiplier les formes. Avant, on ne s’exprimait que par écrit, par dessins, par gravures, de nos jours on peut trouver le média qui nous correspond pour raconter des histoires. On peut trouver des chemins pour raconter et pour exister en fait.

Je vais juste revenir sur le rapport au corps dans vos projets, il se fait essentiellement par l’interaction des nouvelles technologies? Pour toi est-ce que la place des technologies est primordiale, si on les enlève la finalité sera équivalente?

A-B: Ce qui est important c’est qu’il reste la substentique mœlle, si l’on est sur un objet intéressant et que l’on enlève le numérique, il existe encore quelque chose, il reste quelque chose. Après le numérique ne vient que renforcer, enrichir, sublimer l’expérience.
Par exemple, le bureau des temps, s’il n’y avait pas la table interactive, il reste toujours les faxs similés, les tiroirs, tu peux fouiller. En fait, pour moi c’est pareil, le transmedia ce n’est pas que numérique tu passes par pleins de portes pour enrichir un univers et s’adapter un peu à la sensibilité de chacun. Le numérique c’est un plus, par exemple les sites qui mettent en relation les petites mémés qui tricotent avec les gens qui n’ont pas le temps de le faire, si l’on enlève le numérique, il reste toujours ces gens. Le numérique va favoriser la relation, il va accélérer la mise en relation, ça va garder les traces, ça va valoriser mais finalement l’essentiel est là sans le numérique.


- Inventarium, ce sont des résidences proposant à des jeunes de 12 à 25 ans de réfléchir et d’agir collectivement sur notre avenir quotidien. http://lafabulerie.com/blog/projet/linventarium/
- Smartcity. http://lafabulerie.com/wp-content/uploads/2015/12/lafabulerie_festival-numerique-smart-city.jpg
http://www.fluxo.fr/smart-city/
- Exposition Futurs Antérieurs aux Archives municipales de Marseille http://lafabulerie.com/blog/evenement/vernissage-exposition-futurs-anterieurs/
- 5 domaines d’usages: Fabrication numérique, Création transmédia, Intéractivité et objets connectés, Papier support de nouvelles fonctionnalités et Fonctions créatives du web

Rapport de Stage

J’ai eu l’occasion de réaliser un stage de trois mois au sein de l’association La Fabulerie. Ce tiers-lieu est constitué d’un Fablab* et dispose également d’un espace de Comaking*. Il tente de nous faire découvrir les nouveaux usages numériques et l’expérience du Do it Yourself. Les outils numériques prennent chaque jour une place plus importante dans notre quotidien et cela entraîne des mutations de nos usages. Puisque nous sommes vite perdus et dépassés par toute cette technologie, apprendre à l’utiliser est l’un des enjeux de cette association.

I- Les ateliers d’instruments connectés

Qu’est-ce qu’un instrument connecté ? Par raisonnement, un objet connecté est un élément qui va être relié à un ordinateur. Cela peut se faire de différentes manières:

Recyclophone
J’ai pu réaliser différents ateliers durant ma période de stage. Le premier s’est déroulé à l’étang des Aulnes dans le cadre du festival « À vous de jouer ». Sur le thème de la Nouvelle Orléans, les enfants pouvait venir s’initier à la création musicale de manière innovante.
Les enfants choisissent un instrument, prennent un grand morceau de carton, puis le dessinent dessus : un instrument en carton. Il va vraiment fonctionner? Eh bien oui ! Une fois l’instrument de musique entièrement découpé, puis décoré nous passons à l’étape « connexion ». En utilisant de la peinture conductrice, du scotch de cuivre ou bien avec des moyens plus rudimentaire comme du papier aluminium, nous créons les touches qui deviendront les points interactifs de votre objet. Par la suite, il faut choisir des samples parmi une banque de sons en associant un son à une touche. Pour que votre instrument fonctionne il est nécessaire de le connecter à votre ordinateur, au moyen d’un makey makey. Cette petite carte remplace votre clavier et si vous la branchez à n’importe quel objet conducteur d’électricité, votre corps étant également conducteur, une interaction est possible.
C’est l’occasion d’initier les enfants à la création Do It Yourself et à la bidouille numérique.

Lutherie Sauvage
L’art de la lutherie sauvage est de fabriquer des instruments de musique originaux avec des matériaux inattendus et des objets détournés de leur fonction première. La Fabulerie essaie de promouvoir le milieu numérique de façon ludique mais également citoyenne. En s’associant avec le recyclodrome* de Marseille, servant de ressourcerie*, cet atelier en collaboration avec le château d’Avignon initie les enfants à lutter contre le gaspillage et l’obsolescence programmée par le réemploi de divers objets. Les matériaux usagers comme le carton, le plastique, métaux, bois, jouets, couverts, etc. Bref tout ce que l’on peut jeter au cours d’une vie devient matière à création.
L’atelier se réalise en deux parties, la création d’un instrument de musique à partir d’éléments recyclés et le prototypage d’un instrument connecté. Cet atelier vise à sensibiliser les jeunes au recyclage, tout objet faisant partie de notre quotidien peut trouver une seconde vie en le détournant de son utilisation première, et à développer la sensibilité créative de chacun, petit comme grand.

Allô les Martiens? Ici la Terre
Dans le cadre de l’exposition « Play, Design pour les martiens » au Musée du Château Borély, ce dernier atelier tend à faire explorer les techniques manuelles et numériques « futuristes » aux enfants. Chaque participant imagine son message parlant de la vie quotidienne humaine, le message doit être visuel et sonore. Pour transmettre son message aux martiens, l’animation met à portée des petits un scanner, une découpeuse robot et un makey makey.

Ces nouveaux outils et ces nouvelles pratiques sont peu connus du grand public, les rendre ludiques et accessibles à un jeune public tend à montrer les possibilités qu’engendre les nouvelles technologies et à renforcer ces usages.

II- Futurs Antérieurs.

J’ai eu l’occasion de participer à la naissance, au développement et au montage de l’exposition « Futurs Antérieurs » aux Archives de Marseille. Un appel à projet fut lancé pour faire connaître ce lieu car malgré leur communication, peu de gens se rendent dans ce lieu. Cette exposition met aujourd’hui le fond d’archives de Marseille en avant par le biais d’une médiation numérique innovante et interactive. Chaque visiteur doit se sentir à sa place en venant participant à cette exposition, que ce soit pour se souvenir ou pour découvrir. Les archives sont composées d’une grande partie de lettres, d’éditions, de témoignages, de parchemins, de sceaux, de photos, de journaux d’époques… Mettre en valeur ces trésors oubliés par l’échange avec les visiteurs, mais pouvons interagir avec sans les détériorer ?

Qui est qui?
Sous forme d’animation, cette galerie tend à promouvoir d’anciennes personnalités marseillaises au moyen des nouvelles technologies. n passant devant ces portraits, il est possible que vous vous sentiez observé, ou bien même que certains se mettent à vous parler. À partir de photographies d’archives scannées, les personnages sont animés au moyen du logiciel crazytalk. En balisant des points d’ancrage sur les points stratégiques du visage, tels que les yeux, les sourcils, la bouche et les contours du visage afin de rendre plus réaliste les micros expressions du visages lors d’une prise de parole. Ce ne sont plus de simples photographies, gravures ou tableaux qui sont disposés dans la pièce, mais des écrans camouflés par des cadres d’époques. Cela est d’autant plus perturbant que l’œil s’apercevra de l’animation qu’en passant devant. À partir des récits racontés par les personnages, les visiteurs sont invités à deviner l’identité de celui-ci.

Trame-Trame
On entre dans une cabine obscure, on se munit d’un casque immersif pour voyager à travers les vieux paysages marseillais. La réalité virtuelle a la capacité de nous immerger hors de la réalité. Un décor d’un tramway datant du XIXème siècle a été recréé en 3D. À travers les vitres, on peut remarquer une fresque superposant les différents lieux emblématiques de Marseille dans les années 1900. La fresque est divisée en trois parties afin de lui donner du relief. Pour que l’espace ne semble pas abandonné de vie humaine, la première couche est composée de personnages en situation urbaine, la deuxième constitue la partie urbaine avec des bâtiments de toutes part, enfin la dernière couche vient se poser comme un arrière plan avec des monuments plus imposants et plus lointains. Les plans défilent à des vitesses légèrement différentes pour donner la sensation au tramway d’avancer.

Cache-cache
Le dernier atelier sur lequel j’ai travaillé est la création d’un petit jeu. Des anachronismes se sont glissés dans des photographies anciennes. Ce sont des objets de notre époque actuelle qui font office d’erreurs à trouver.

Travailler sur cette exposition a été intéressant sous divers aspects. Voir les différentes étapes de création d’une exposition, c’est à dire de la naissance au développement, puis du montage jusqu’au vernissage de. De l’autre, le mise en valeur d’objets réels par le numérique, difficile d’imaginer dans une exposition de quelles manières les nouvelles technologies peuvent soutenir des contenus. La notion d’interactivé avec le spectateur enlève la frustration de ne pas pouvoir interagir, toucher une oeuvre dans une exposition plus classique.

Dispositifs Tehniques

Intentions

Ma réflexion et mes recherches m’ont permis de constater que le corps est intimement et indéniablement lié à notre processus de lecture. L’édition aujourd’hui n’a que peu évolué, souvent seul l’aspect visuel est pris en compte dans cette démarche. Pourtant, il est possible de combiner des sens dans la lecture, comme une image faisant appel à du son par sa composition graphique ou encore l’incorporation d’un autre sens comme le toucher avec le braille, le gaufrage ou l’incorporation de matières. Par ailleurs, le développement du numérique à donné naissance à de nouvelles technologies nous ouvrant des possibles. Elles permettent une interactivité plus stimulante et originale pour l’individu acteur.
Dans cette partie technique, je souhaite alors mettre en avant le corps et les sens par des procédés interactifs, qu’ils soient numériques ou non. Décloisonner et sortir des supports classiques pourrait me permettre de donner une nouvelle définition de la lecture. Elle serait multisensorielle et donnerait une nouvelle conscience du corps.
L’intégration du numérique me semble importante par l’échange direct avec l’individu, mais aussi comme un moyen de création d’objets, de supports, etc.
Pour moi, les notions d’expérimentation, d’interactivité et de sensoriel, sont l’essence même du projet. Je n’ai donc pas d’objectif définitif mais plutôt des pistes à bidouiller. Le projet final pourra s’engager sous forme de divers dispositifs engageant différemment les sens.

Techniques envisagées et à expérimenter

Makey Makey, Arduino, Processing
Capteur de pression, encre conductrice
Gaufrage, Blender, Imprimante 3D
Lecteur de codes barres
Mapping, Kinect

Concepts

Créer des dispositifs associant divers sens, par la mise en relation du toucher, de la vue, de l’ouïe.

Le makeymakey est très facile à s’approprier et permet diverses utilisations. Des touches alimentaires, faites à partir de Jelly servent d’éléments déclencheurs d’un son et d’un visuel. La création d’une histoire sonore, visuelle et gustative.

Jouer sur l’esprit critique et le décalage en déformant la relation du connoté et dénoté. Créer le trouble et l’incompréhension.

Spacialiser la lecture pour étendre le champ des possibles et ne pas se restreindre aux supports de lecture classique. Une narration qui nous engagerait physiquement.

Faire entendre une image, créer un paysage sonore. Certains logiciels sont capables de convertir une image en signal sonore.

Mots-Clés

Interactivité - Multisensoriel - Relation - Papier - Numérique - Corps - Lecteur - Trouble - Mobilisation - Sens - Décalage - Analogie - Complémentarité - Synchronisation

Références

* L’interprétation du langage est depuis toujours étroitement liée au corps.
Marion Estavoyer l’exprime dans son mémoire comme une extension totale à la lecture, le corps à part entière devient seul élément de déchiffrage.

Contexte : Il existe une relation évidente du corps et du lecteur durant notre travail de lecture : nos yeux (qui parcourent la page), nos mains (qui manipulent le support) et notre cerveau qui synthétise l’information perçue.
Pourtant la lecture mobilise le corps dans sa globalité. En observant ces corps qui lisent, elle a découvert que les publics malvoyants peinaient à lire. Ils n’avaient accès qu’à une infime partie des textes disponibles, car la plupart des supports ne les prennent pas en compte, et par conséquent ne leur sont pas ou peu adaptés. 

Public : Ce projet vise particulièrement les aveugles et malvoyants afin de leur procurer une expérience de lecture plus adapté à leurs besoins. Mais également tout à chacun, car il est important de comprendre les problèmes subis au quotidien par ces personnes malvoyantes afin de mieux les cibler.

Matériaux : La Tactilographie est une police de caractère tactile et visuelle en bois (déclinée dans une version papier). Ces supports multisensoriels permettent aux lecteurs d’appréhender le texte et les lettres de l’alphabet de manière ludique, tout en mettant en jeu leurs corps par la collaboration d’autres sens.

Avec Lutrin Sonore (mêlant visuel, tactile et sonore), elle développe une proposition qui exploite une expérience sensorielle du lecteur en sollicitant son œil, sa main qui touche le support guidée par des éléments tactiles et la mise en jeu de son corps pour accéder à une lecture sonore partagée.

* Le travail d’Étienne Mineur avec les Éditions Volumiques est intéressant car le livre n’est plus passif, la narration devient interactive en combinant textes, images et sons.

Contexte : « Comment envisager le livre et sa lecture au XXIe siècle, après la grande révolution des médias liée au numérique et aux réseaux ? L’interactivité, le jeu vidéo en particulier, conduit à une conception nouvelle de la narration et du rôle du lecteur. Comment introduire les usages et l’expérience utilisateur des médias numériques dans le livre papier afin de l’actualiser, étendre son champ et engager le lecteur d’une nouvelle manière ? » Ce sont toutes les questions que les éditions volumiques cherchent à dégager en développant de nouveaux types de livres fondés sur la mise en relation du tangible et du numérique. Il ne faut pas opposer le livre numérique au livre papier, mais les enrichir réciproquement en plaçant un rapport tactile, émotionnel et intime au savoir qu’offre le livre papier, avec les dimensions nouvelles qu’apporte le numérique.

Public : Petits et grands

Matériaux : Sous la forme d’un prototype, le livre sonore se compose d’un iPhone que l’on glisse dans un étui et le lecteur déclenche des sons en posant son doigt sur le papier et indique au téléphone à quelle page le livre est ouvert. Une narration interactive se met en place utilisant le texte, le dessin et le son.

* Coralie Gourguechon avec sa planche anatomique du haut-parleur, elle détourne de façon éducative le papier. Il est devient un véritable objet sonore. À plat, le système est éteint. Si l’on déploie le cône, celui-ci prend alors toute sa fonction de haut-parleur.

Contexte : La planche anatomique du haut-parleur est conçue comme un outil interactif et éducatif. Elle démontre une simplification visuelle des circuits apparemment complexes.

Public : Petits et grands

Matériaux : Composants cartons tels que des antennes de radio, haut-parleurs, commutateurs et connecteurs de la batterie 9. L’assemblage des pièces du haut-parleur est réalisé à partir de colle et de stylos à encre conductrices.

Glossaire

Audition: Perception des sons résultant de l’excitation par des ondes sonores de l’organe sensoriel (organe de Corti) qui transforme un message mécanique en un courant bioélectrique transmis aux centres supérieurs d’intégration, où a lieu l’élaboration de la sensation auditive. Action d’entendre, d’écouter.

Analogie: Point commun à des choses et qui crée leur ressemblance : Deux romans dans lesquels on relève de nombreuses analogies.
Action qui détermine l’apparition dans la langue de nouvelles formes à partir de correspondances qui existent entre des termes d’une même classe.

Bimodale: entre deux modalités sensorielles – ou multimodale – entre au moins trois modes sensoriels –, elle peut se manifester de manière uni- ou bidirectionnelle. Cognitive, elle favorise l’association d’un mode sensoriel à une représentation mentale précise.

Braille: Écriture en relief à l’usage des aveugles.

Codex: Dans l’Antiquité, livre fait de feuilles cousues ensemble. (Le codex s’opposait au volumen, qui était un rouleau.)

Cognitif: Le terme cognitif renvoie à l’ensemble des processus psychiques liés à l’esprit. Il englobe une multitude de fonctions orchestrées par le cerveau : le langage, la mémoire, le raisonnement, la coordination des mouvements (praxies), les reconnaissances (gnosies), la perception et l’apprentissage ainsi que les fonctions exécutives regroupant le raisonnement, la planification, le jugement et l’organisation.

Comaking: (anglais) Espace collaboratif et coopératif de création.

Compréhension: d’un concept, d’un terme. Propriété d’avoir en soi un certain nombre de caractères, de traits spécifiques; ensemble de ces caractères.

Connotation: Ensemble des éléments de sens qui peuvent s’ajouter à ce sens littéral.

Corporalité: Caractère de ce qui est corporel*, de ce qui a un corps humain, de ce qui est un corps matériel. Caractère de la perception visuelle qui permet l’impression de volume.

Coworking: (anglais) Le coworking, travail coopératif ou encore cotravail est un type d’organisation du travail qui regroupe deux notions : un espace de travail partagé, mais aussi un réseau de travailleurs encourageant l’échange et l’ouverture.

Décrypter: Retrouver le sens clair d’un message chiffré en écriture secrète, sans connaître la clef ayant servi à le transcrire. Rendre intelligible un texte obscur, l’élucider.

Dématerialisation: Action ou fait de donner une apparence immatérielle. Action ou fait d’élever au-dessus de la matière, de spiritualiser.

Design: C’est un processus intellectuel créatif, pluridisciplinaire et humaniste, dont le but est de traiter et d’apporter des solutions aux problématiques de tous les jours, petites et grandes, liées aux enjeux économiques, sociaux et environnementaux.

Do it Yourself: (anglais) (DIY) C’est la dénomination classique de tout ce qui a trait au bricolage On peut traduire Do It Yourself par ‘’Réalisez le vous-même’’ .

En noir: Un document qui n’est pas écrit en braille et qui n’est donc pas lisible par un aveugle est dit « en noir » ou « noir » (un livre en noir, par exemple).

Fablab: (anglais) De la contraction de l’anglais fabrication laboratory, « laboratoire de fabrication », c’est un lieu ouvert au public où il est mis à sa disposition toutes sortes d’outils, notamment des machines-outils pilotées par ordinateur, pour la conception et la réalisation d’objets. Pour être appelé Fab Lab, un atelier de fabrication doit respecter la charte des Fab Labs, mise en place par le Massachusetts Institute of Technology (MIT).

Graphisme: Selon Annick Lantenois, « le design graphique peut être défini comme le traitement formel des informations et des savoirs. Le designer graphique est alors un médiateur qui agit sur les conditions de réception et d’appropriation des informations et des savoirs qu’il met en forme. » Selon ses domaines d’intervention (illustration, affiche, communication d’entreprise, presse, édition, packaging, publicité, design web, signalétique, identité visuelle, etc.), il fait partie de la chaîne graphique liée à l’imprimerie ou à d’autres médias.

Interactif, interactive: Se dit de phénomènes qui réagissent les uns sur les autres. En informatique, doué d’interactivité. Se dit d’un support de communication favorisant un échange avec le public : Émission, exposition, livre interactifs.

Interprétation: D’une manière générale, le mot interprétation (du latin interpretatio) désigne l’action d’interpréter ou bien le résultat de cette action.
En linguistique, une interprétation est le fait de donner un sens à un signe, un geste, une parole. Elle relève du domaine de la sémantique.
En herméneutique, on cherche à interpréter le sens d’un texte en allant au-delà du sens premier (ou littéral), pour trouver les autres sens, les sens cachés (ou sens spirituels : allégorique, tropologique, anagogique).

Livre: Le livre est un assemblage portatif d’éléments présentant une surface plane sur lesquels un texte peut être écrit de façon durable.

Lire: -Reconnaître les signes graphiques d’une langue, former mentalement ou à voix haute les sons que ces signes ou leurs combinaisons représentent et leur associer un sens : Lire le chinois, le braille. Il ne sait ni lire ni écrire.
-Prendre connaissance du contenu d’un texte par la lecture : Lire le journal.
-S’adonner à la lecture des livres : Cet enfant ne lit pas assez.
-Énoncer à voix haute un texte écrit, pour le porter à la connaissance d’autrui : Lire une histoire aux enfants.
-Savoir reconnaître de la musique, des notes en les parcourant des yeux.
-Comprendre, pouvoir interpréter un ensemble de signes autres que ceux de l’écriture, une image, etc. : Médecin qui lit une radio. Lire un graphique.
-Comprendre quelque chose, l’interpréter d’une certaine façon : Une statistique qu’on peut lire de deux manières.
-En parlant d’un appareil, reproduire ce qui est enregistré.
-Reconnaître une information présentée à un organe d’entrée ou stockée dans une mémoire, afin de la transmettre vers une autre unité de l’ordinateur.
-Comprendre quelque chose, le discerner, le reconnaître à certains signes : J’ai lu dans ses yeux du mépris.
-Prévoir l’avenir en interprétant des signes qu’on croit significatifs.

Livre Augmenté: Amplification d’un support papier par l’intégration du numérique ou des facteurs interactifs.

Livre-objet: Le livre-objet dépasse le conflit texte/illustration. Il peut revêtir deux formes. Premièrement, la collaboration entre un écrivain et un artiste : ce dernier crée un emboîtage pour le livre sous forme de sculpture. Deuxièmement, il peut être le travail d’un seul artiste : celui-ci crée une véritable sculpture en forme de livre (avec ou non un livre véritable comme matière première). Il garde parfois l’apparence matérielle du livre, mais en dépasse généralement la forme traditionnelle.

Makey Makey: (anglais) Nom d’un produit composé d’une carte électronique et de menus accessoires offrant moyen d’interfacer un ordinateur avec le Monde Réel.

Multisensorialité: Fait appel à plusieurs sens simultanément.

Multimodale: Qui se compose de plusieurs modes de transports. C’est le transport combiné ou intermodal.

Numérique: Informatique et télécommunications
Se dit de la représentation d’informations ou de grandeurs physiques au moyen de caractères, tels que des chiffres, ou au moyen de signaux à valeurs discrètes. Se dit des systèmes, dispositifs ou procédés employant ce mode de représentation discrète, par opposition à analogique.

Objectif: Dont la réalité s’impose à l’esprit indépendamment de toute interprétation. Dont la réalité s’impose à l’esprit indépendamment de toute interprétation

Obsolescence Programmée: est définie par la dépréciation d’un matériel ou d’un équipement avant son usure matérielle. Mais le terme « programmé » se réfère quant à lui à ce qui est planifié, déterminé à l’avance.

Oculus rift: (anglais) est un périphérique informatique de réalité virtuelle en cours de développement et conçu par l’entreprise Oculus VR. L’appareil se présente sous la forme d’un masque recouvrant les yeux et attaché au visage par une sangle fermée à l’arrière du crâne. Un écran plat numérique est placé à quelques centimètres en face des yeux, perpendiculairement à l’axe du regard. Cet écran affiche une image stéréoscopique déformée numériquement pour inverser la distorsion optique créée par deux lentilles situées en face de chaque œil, dans le but d’augmenter le champ visuel et la définition en face de la fovéa4,5,6. L’écran est placé sur le plan focal de ces lentilles, de telle sorte que l’image virtuelle ainsi créée se trouve projetée à l’infini. Divers capteurs permettent de détecter les mouvements de tête de l’utilisateur, ce qui permet d’adapter en temps réel l’image projetée sur l’écran, afin de produire l’illusion d’une immersion dans la scène restituée.

Pérégrination: Voyage, trajet complexe d’un lieu à un autre (surtout pluriel).

Réalité Augmentée: (RA) elle désigne des systèmes informatiques qui rendent possible la superposition en temps réel d’objets virtuels 2D ou 3D dans le monde réel. Elle s’applique aussi bien à la perception visuelle (superposition d’image virtuelle aux images réelles) qu’aux perceptions proprioceptives comme le tactile, l’audition ou l’olfactif.

Réalité virtuelle (VR) : Terme qui s’applique à des environnements conçus par ordinateur permettant de simuler une présence physique dans des endroits du monde réel et des mondes virtuelles.

Ressourcerie: Les ressourceries, ou recycleries, sont des établissements ayant pour objectif principal de favoriser le réemploi ou la réutilisation de certains matériaux considérés comme des déchets. Ces installations proposent une solution aux collectivités et aux entreprises pour l’élimination de déchets tels que les encombrants et les DIB.

Sample: (anglais) c’est un échantillon, un extrait musical, ou son, réutilisé dans une nouvelle composition musicale, souvent joué en boucle. L’extrait original peut être une note, un motif musical ou sonore quelconque.

Signe: est composé d’un signifiant et d’un signifié. Le signifiant et le signifié sont indissociables : ils ne peuvent pas être séparés (pas plus que le recto et le verso d’une feuille ne peuvent l’être).

Signifiant: est une association de lettres formant des sons. C’est, en quelque sorte, le contenant.

Signifié: est le sens, la définition du signe. C’est le contenu.

Subjectifv Qui relève du sujet défini comme être pensant, comme conscience individuelle, par opposition à objectif.
Se dit de ce qui est individuel et susceptible de varier en fonction de la personnalité de chacun : Une interprétation subjective d’un texte.

Synesthésie: (du grec syn, avec (union), et aesthesis, sensation) Phénomène neurologique par lequel deux ou plusieurs sens sont associés. Le trouble de la perception des sensations, à travers lequel le sujet associe deux ou plusieurs sens à partir d’un seul stimulus. Par exemple, une personne peut associer un son à une couleur (synopsie), une lettre à une position dans l’espace ou une date à une personnalité.
La synesthésie, du grec syn (union) et aesthesis (sensation), se réfère en priorité à une aptitude neurologique selon laquelle deux ou plusieurs sens de perception se trouvent associés par le sujet.

Synopsie (ou synopie) est une forme particulière de synesthésie qui fait qu’un son provoque chez certains sujets prédisposés des phénomènes de vision colorée sans lien apparent avec la sensation objective du son entendu. Ces couleurs varient non seulement avec les sons, mais aussi avec les sujets.

Transmettre: Faire passer à quelqu’un une qualité, un caractère, des connaissances. Transmettre le savoir, des traditions. Communiquer.

Thaumatrope: du thauma, prodige et tropion, tourner, c’est un jouet optique qui exploite le phénomène de la persistance rétinienne. Il s’agit d’un disque illustré sur ses deux faces et où sont accrochées deux ficelles diamétralement opposés. En faisant tourner entre le pouce et l’index ces ficelles, le disque suit le mouvement et les deux dessins se confondent.

Usage: Fait de se servir de quelque chose : L’usage de la micro-informatique s’est largement répandu. Perdre l’usage de la parole.
Fait d’employer quelque chose pour sa consommation, pour ses besoins personnels, etc. : Interdire l’usage du tabac.
Destination, fonction de quelque chose, emploi qu’on peut en faire : Un couteau à divers usages. Des locaux à usage commercial.
Pratique habituellement observée dans un groupe, dans une société ; coutume : Aller contre l’usage établi.
Vision: La vision est le sens propre à la perception visuelle du monde à l’aide de la partie visible du rayonnement électromagnétique soit, pour l’œil humain.

Volumen: mot latin signifiant « chose enroulée ». C’’est un livre à base de feuilles de papyrus collées les unes aux autres et qui s’enroule sur lui-même. Il a été créé en Égypte vers 3000 av. J.-C. Le texte est rédigé en colonnes parallèles assez étroites. Il sera ensuite progressivement remplacé par le codex.

Bibliographie et Références

Synthèse

-http://classes.bnf.fr/livre/arret/histoire-du-livre/premiers-supports/07.htm
-http://codicologia.irht.cnrs.fr/
-http://www.editions-hazan.fr/ouvrage/562170/el-lissitzky-:-l-experienc-de-la-totalite-anne-marie-rubio
-(place du corps lecteur)http://www.enssib.fr/bibliotheque-numerique/documents/63564-corps-et-lecture-chez-roland-barthes.pdf
-http://expositions.bnf.fr/lecture/anthologie/Le_corps_du_lecteur.pdf
-http://www.enssib.fr/breves/2014/09/15/la-lecture-lecran-et-le-corps-pensant
-http://lafeuille.blog.lemonde.fr/2014/09/12/non-on-ne-memorise-pas-moins-bien-sur-kindle-que-sur-papier/#xtor=RSS-32280322

-Nies, Fritz. Imagerie de la lecture. Bulletin des bibliothèques de France [en ligne], n° 3, 1996 [consulté le 24 février 2016]. Disponible sur le Web : . ISSN 1292-8399.

-http://thefunambulist.net/2013/09/11/topie-impitoyable-ethics-of-the-viscous-body-munari-mclean
-faustino/#more-13344
-http://www.paris-art.com/editeur-design/i-prelibri/Bruno-Munari/538.html
-http://fadingpaper.blogspot.fr/2012/10/les-livres-illisibles-de-bruno-munari.html

Photos Campagne Adia: Ne vous fiez pas aux apparences
-http://hyzy.fr/2015/02/26/adia-ne-vous-fiez-pas-aux-apparences/#prettyPhoto

Le braille: https://fr.wikipedia.org/wiki/Braille>
Police braille image: http://chezdom.net/blog/category/polices-braille/

-http://www.enssib.fr/bibliotheque-numerique/visionner/56430-du-papier-a-l-ecran-lire-se-transforme
-Volume! Voir la musique: Terrain, n°53
-Projet Synesthéorie. Sons et Couleurs: des noces inachevées, Patrick Crispini < http://synestheorie.fr/2014/05/20/sons-couleurs-noces-inachevees-patrick-crispini/#.Vs4IyfFGKCN >
-Paysages sonores < http://synestheorie.fr/paysages-sonores/#.Vs4t9vFGKCM >
-Portail dédié à la synesthésie < http://synesthesie-info.psyblogs.net/p/sommaire-du-site-i.html >

-La Grande Guerre - Le premier jour de la bataille de la somme, de Joe Sacco. Arte Editions/ Futuropolis < http://pro.arte.tv/2014/04/en-librairie-la-grande-guerre-le-premier-jour-de-la-bataille-de-la-somme-de-joe-sacco-chez-arte-editionsfuturopolis/ >

-La partie musicale de la peinture. L’art du Paysage - Tdc n° 1012 < https://www.reseau-canope.fr/tdc/fileadmin/docs/tdc_1012_paysage/article.pdf >
-http://lafeuille.blog.lemonde.fr/2014/09/12/non-on-ne-memorise-pas-moins-bien-sur-kindle-que-sur-papier/#xtor=RSS-32280322

-H.N.Werkman, Alston W.Purvis, Monographic
-Appetite For Design, EAT ME, Product, Packaging, Art, Branding, Interior. Victor:ary

-Dazibao n°26, revue de l’agence régionale du livre papa. Acteurs du livre, comment lisez-vous?

-Lire L’Album, Sophie Van der Linden, Édition 2007, L’atelier du poisson soluble
-Du papier à l’écran: Lire se transforme. Claire Bélisle, conférence, enssib, 17 octobre 2011. < http://www.enssib.fr/bibliotheque-numerique/visionner/56430-du-papier-a-l-ecran-lire-se-transforme >

-Non on ne mémorise pas moins bien sur kindle que sur un support papierhttp://lafeuille.blog.lemonde.fr/2014/09/12/non-on-ne-memorise-pas-moins-bien-sur-kindle-que-sur-papier/#xtor=RSS-32280322

-Guide pratique du travail sur écran: http://www.sphere.univ-paris-diderot.fr/IMG/pdf/Guide_travail_ecran.pdf

-http://www.lemonde.fr/vous/article/2014/06/02/sed

ATC: Arts, techniques et civilisations

-https://fr.wikipedia.org/wiki/Pierre_et_le_Loup
-(Vinyl): http://www.discogs.com/Serge-Prokofiev-G%C3%A9rard-Philipe-G-Rojdestvenski-Orchestre-Symphonique-De-LURSS-Gil-Renaud-Pierre-Et-/release/1472984
-(CD): https://www.discogs.com/fr/Serge-Prokofiev-G%C3%A9rard-Philipe-G-Rojdestvenski-Orchestre-Symphonique-De-LURSS-Gil-Renaud-Pierre-Et-/release/7639105
-https://www.wdl.org/fr/item/9609/
-Video Pierre et le Loup: http://www.dailymotion.com/video/x5n255_pierre-et-le-loup-walt-disney-1946_music
-http://www.dailymotion.com/video/xvjuyv (critique fantasia)
-Music Land-Silly Symphony: https://www.youtube.com/watch?v=dihJ1w48Jh0
-https://fr.wikipedia.org/wiki/Fantasia_%28film,_1940%29
-http://dessindrawing.blogspot.fr/2011/09/maiakovski.html
-http://www.publie.net/poesie-livre-electronique-question-despaces/
-https://math.dartmouth.edu/~doyle/docs/coup/scan/coup.pdf

Fiche de lecture

-Chap III - Analogies (2): nature et musique, p80. Nostalgie de l’unité:Paysage et musique dans la peinture de P.O.Runge et C.D.Frierdrich, par Julie Ramos. Édition:Aesthetica, Presses Universitaires de Rennes.

-http://www.artsetsocietes.org/f/f-ramos.html

-http://hicsa.univ-paris1.fr/documents/file/CV%20Ramos.pdf

-http://www.univ-paris1.fr/recherche/page-perso/page/?tx_oxcspagepersonnel_pi1[uid]=jramos

Références

-http://www.sonore-visuel.fr/
-http://lachoseimprimee.com/category/themes/tactilite-et-materiaux/
-http://www.publie.net/poesie-livre-electronique-question-despaces/

Mémoire : Le corps Lecteur, Marion Estavoyer. Dsaa, Lycée St Exupéry 2013
Mémoire: Toucher pour voir, Claire Lordet. Dnap, Esac 2010
Mémoire: Évolution des usages, technologiques & interfaces des applications en ligne, Geoffrey Dorme, Ensad 2008
Mémoire: Quelles évolutions possibles pour l’édition jeunesse adaptés au handicap visuel? , Charline Humbert. Dnsep, Esap 2012

Coralie Gourguechon: Anatomie du haut parleur
-http://www.coraliegourguechon.fr/Anatomical-board-of-a-speaker

Etienne Mineur: Le livre Sonore
-http://volumique.com/v2/portfolio/sound-book/

Rapport de stage

Site la Fabulerie
-http://lafabulerie.com/

Glossaire

-Wikipédia
-Larousse internet
-L’internaute.com
-Centre national de ressources textuelles et lexicales < http://www.cnrtl.fr/definition/compr%C3%A9hension>
-Dictionnaire étymologique

-Signe, signifiant, signifié
-livre objet < https://www.ac-caen.fr/ia61/circos/laigle/livrob/def.htm >
-design < http://www.alliance-francaise-des-designers.org/definition-du-design.html >

-http://carrefour-numerique.cite-sciences.fr/fablab/wiki/doku.php?id=charte
-http://www.olecorre.com/4029/Do-It-Yourself
-http://www.augmented-reality.fr/cest-quoi-la-realite-augmentee/
-http://www.waolab.com/definition-realite-augmentee.html
-http://www.obsolescence.fr/obsolescence-programmee-definition/
-http://portecle.thaumatrope.free.fr/index.php?option=com_content&view=article&
id=30:documentation-wiki&catid=12:catdocumentation&Itemid=9